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La page poésie d'Odile : Amedeo Modigliani, de la fragilité à la douceur

1 Avril 2025 , Rédigé par verdon-info Publié dans #Image et poésie

La page poésie d'Odile : Amedeo Modigliani, de la fragilité à la douceur

Amedeo Modigliani, de la fragilité à la douceur

Le musée Zadkine, à Paris, retrace la longue amitié et la complicité artistique entre le sculpteur russe Ossip Zadkine et l’Italien Modigliani, avec 90 œuvres associées. (Attention : jusqu’au 31 mars). Je profite de cette occasion pour mettre à l’honneur ce peintre qui a longtemps hésité entre la sculpture et la peinture. Les deux artistes se sont liés à Montparnasse de 1913 à 1920 grâce à la sculpture. Puis la guerre les ayant séparés, « Modi » a de nouveau changé de voie, revenant au dessin et à la peinture. De santé fragile (pneumopathies récurrentes), et addict aux drogues et à l’alcool, il est mort à 35 ans, laissant tout de même de très nombreuses œuvres dont beaucoup de portraits. J’ai appris à apprécier Modigliani comme j’ai appris à apprécier Chagall, en apprenant à les connaître. Ces têtes penchées et ces yeux vides ne m’attiraient pas particulièrement, mais la douceur des traits, la mélancolie, l’air rêveur, apportés justement par ces yeux tournés vers l’intérieur, ces longs cous graciles, m’ont touchée peu à peu. On ne sait ni quand, ni d’où vient l’émotion.

Pour cette histoire d’amitié, digne de Montaigne et La Boétie, je dédie à Modigliani ce magnifique sonnet de Musset, qui chante l’amitié perdue à cause d’une femme, mais plein d’empathie et d’altruisme malgré la nostalgie et la mélancolie. Les âmes chagrines diront que l’auteur est un poil culpabilisant et même un  peu jaloux dans l’évocation de cet abandon (« Près de votre maîtresse », coeur « à tout jamais fermé »). Ce sonnet lyrique dévoile la grande sensibilité de l’auteur, ici face au déménagement de son grand ami. . Quant à la forme, j’adore ces poèmes romantiques, encore rigoureusement académiques, en Alexandrins aux césures impeccables (6 pieds/6 pieds) et à la rime riche (ou tout du moins suffisantes* dans ce texte, mais on lui pardonnera). On reconnaît bien là l’emphase romantique : « Dans la force et la fleur de la belle jeunesse », parfois désuète, certes, mais on ne s’en lasse pas. A noter que le titre AM.AT (à M. Alfred Tattet, son ami d’enfance) signifie « il aime » en latin. Etonnant non ? 

Le court poème d’Amiel, dans le ton un peu « ’amitié particulière », est basé sur des anaphores qui martèlent et dénotent un peu de colère rentrée et de jalousie « tes », « tout cela », « toi-même ». Un poème sur la déception, la peur de l’insincérité. A noter la répétition des pronoms et adjectifs à la 2ème personne, renforcée par l’allitération en t (tes, entretient, entendu, t’, tout) qui insistent sur l’importance de la personne physique de l’interlocuteur. Et puisque nous parlions des vers de Musset, notons qu’ici les rimes sont riches ou même « léonines » c’est-à-dire qu’elles portent sur 3 phonèmes –sons-(vœux/aveux ; aime/même). A noter que les deux poèmes commencent comme une lettre, avec un mot en exergue « ainsi, mon cher ami, » et « adieu » pour l’un, et « ami, » pour l’autre. Ces poèmes, avec la présence de cet en-tête, sont des missives à l’être cher. Un petit mot sur Henri-Frédéric Amiel, écrivain et philosophe suisse du XIXème siècle (professeur de philo et littérature à  l’université de Genève) qui est resté célèbre pour ses écrits philosophiques, notamment dans son énorme journal intime.

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*Allez, petit rappel de nos cours du lycée sur les rimes : En principe la rime ne prend en compte que les sons, pas les lettres ni les syllabes,

Rime pauvre : quand le seul phonème rimant est la voyelle tonique finale : bateaux/vaisseaux. Pas vraiment une rime pour moi.

Rime suffisante : quand deux phonèmes  sont répétés (dont la dernière voyelle tonique) : nia/lia

Rime riche : quand la répétition porte sur trois phonèmes ou plus (incluant la dernière voyelle tonique) : ensemble/ressemble

Rime léonine (ou double) quand elle comprend deux voyelles ou deux syllabes prononcées : averse/traverse

 N.B. une rime constitue un holorime lorsqu'elle englobe tout le vers : essayez ce tour de force pour vous amuser !

Gall, amant de la Reine, alla, tour magnanime,

Galamment de l'arène à la Tour Magne, à Nîmes. 

La page poésie d'Odile : Amedeo Modigliani, de la fragilité à la douceur
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B
Merci à Françoise de m'avoir signalé cette coquille !
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B
Chers amis et amies, mille excuses, je pense que vous avez corrigé par vous-même, mais une coquille s'est glissée dans mon texte, il faut lire XIXème siècle et non XIVème siècle pour ce pauvre Henri Frédéric Amiel que j'ai vieilli de quelques centaines d'années le pauvre ! Pour info il est né en 1821 et mort en 1881.
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