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Actualites locales Moyen et Haut Verdon...

"contes et légendes" d'Odile

16 Avril 2021 , Rédigé par verdon-info Publié dans #Image et poésie

VOUS AVEZ DIT BIZARRE ?

LA -OU LES- LEGENDE(S) DU LAPIN DE PAQUES

  Quand les cloches posent au lièvre un lapin !

 

Le lièvre de Pâques, devenu le lapin de Pâques, est une créature imaginaire, de couleurs diverses, et étrangement humain, puisqu’il est souvent représenté marchant debout et doué de parole.  Selon la tradition, il distribue, la veille de Pâques -une importante fête de la chrétienté au demeurant- des « œufs de Pâques » peints ou en chocolat. Ce personnage mystérieux et un peu inquiétant est aussi représenté par un lapin dans les régions anglophones (en anglais : Easter Bunny), mais c'est généralement un lièvre qui assume cette mission dans les régions germanophones (en allemand : Oschterhaas ou Osterhase, « lièvre de Pâques » en français). Dans le Grand Est français, qui calque souvent ses contes et légendes sur les mythes germaniques, un lapin ou un lièvre assure également ce rôle. (Et oui, en Alsace, c'est Osterhas qui dépose œufs et friandises dans les parcs et jardins). 

Dans notre région du sud, on attribue cette fonction aux cloches qui reviennent de Rome, ce qui est déjà un peu plus religieux et un peu moins inquiétant, bien que tout aussi fantaisiste. Si la tradition chrétienne dit que les œufs de Pâques sont apportés par les cloches de retour de Rome, après la Semaine sainte, c’est parce que les œufs n'étant pas consommés pendant la période de jeûne1 du Carême, ils étaient  accumulés jusqu’à Pâques ; il fallait donc les faire cuire afin de les conserver et ceux qui n'étaient plus mangeables étaient décorés. 

Cette légende demande quelques précisions : dans l’imaginaire collectif, les cloches s’étant tues pendant les 3 jours précédant la résurrection du Christ, on racontait aux plus petits qu’elles étaient parties à Rome et qu’elles se remettraient à tinter gaiement en revenant pour Pâques et en semant des œufs dans les jardins pour la joie des enfants. Pourquoi des œufs me direz-vous ? On mélange tout ! Mais non, l'œuf est le symbole de la germination qui se produit au printemps, et de la vie qui va naître. Symbole de la vie, comme le lapin de la fertilité : ces images sont associées à la Résurrection fêtée à Pâques. En effet, le lapin est un symbole païen qui a toujours représenté la fécondité. Cependant, les premiers œufs de Pâques étaient parfois décorés du motif circulaire des trois lièvres, suggérant ainsi qu'ils symbolisaient la Trinité. Voyez, tout se rejoint : le chrétien et le lapin, euh, le païen.

De quel chapeau sort ce lapin ?

 

 

 

Effectivement, de nombreuses coutumes païennes se rattachent à la fête de Pâques, comme aux autres fêtes chrétiennes d’ailleurs, (même Noël, qui est fêté au moment où les jours commencent à rallonger, et qui correspond à la fête de la lumière dans les pays nordiques). Le lapin symbolisait autrefois non seulement la fertilité mais aussi le renouveau (comme le printemps), et c'est en Allemagne du sud que naquit la tradition avant qu'elle ne se répande dans le reste des pays germaniques. Par la suite, cette tradition a été exportée aux États-Unis par des immigrants allemands au XVIIIe siècle. Et de même que la légende d’Halloween -Jack O’ Lantern- qui, partie d’Irlande, nous est revenue comme un boomerang des Etats-Unis, elle est en train de revenir chez nous en force.  En effet, la pauvre cloche a été nettement supplantée par le lapin ces dernières années, pour disparaître presque totalement en 2021.

Il est temps de lever le voile sur les origines diverses et parfois scabreuses de ce fieffé rongeur ! Pour certains, ce mystérieux lapin qui distribue les œufs de Pâques est en fait le fruit de l’amour entre une petite poule et un charmant lapin. Alors qu’il ressemble trait pour trait à son papa, le lapin a tout de même hérité de sa maman, une certaine particularité peu commune pour un mammifère à part l’ornithorynque : celle de pondre des œufs. Mais pas n’importe lesquels puisque les siens sont en chocolats ! Ainsi, dès qu’il est effrayé, il pond un œuf coloré, c’est mieux que les chiens qui eux, lorsqu’ils ont peur, font pipi par terre ! Joli conte non ? 

Pour d’autres, l'origine du lapin viendrait d'une légende allemande dans laquelle une femme pauvre, ne pouvant offrir des friandises à ses enfants, décora des œufs -bien de poule ceux-là- qu'elle cacha dans le jardin. Les enfants, apercevant au même moment un lapin qui s’enfuyait, crurent que celui-ci avait pondu les œufs. 

Le lapin de Pâques court plusieurs lièvres à la fois    

        

Ces légendes sont des contes gentillets que l’on raconte aux enfants avant de s’endormir. Mais toutes ne sont pas aussi mignonnes ! Certaines légendes ne valent pas un pet de lapin, comme celle où les anciens cachaient des œufs dans le sol pour le rendre plus fertile ou encore cette autre où la déesse de la fertilité transformait son poulet en lapin, qu’elle forçait à retrouver ses propres œufs. Un peu l'inverse de ce que lapin de Pâques fait maintenant ! Dans les traditions celtiques et scandinaves, le lièvre était le symbole de la déesse mère et sa présence n’est peut-être pas aussi innocente que l’on croit. Voyez plutôt : le lapin de Pâques n'est pas uniquement une référence chrétienne et on a beau relire les récits bibliques, on ne trouve pas trace de lièvres, ni de lapins dans les célébrations pascales, ni des œufs peints, ni même du fameux voyage des cloches à Rome. Force est de constater, tout du moins de supposer, que l’imagerie de Pâques que la coutume et le commerce nous imposent, à nous et à nos enfants, vient… d’ailleurs. 

L’ailleurs c’est plutôt le nord. Le grand nord. En effet, une autre origine du lapin de Pâques vient de Saxe où l'on honorait au printemps la déesse Éostre (ou Eastre), qui a d’ailleurs donné son nom à Easter (Pâques en anglais). Le lièvre étant l’animal emblématique de la déesse, il est resté associé aux fêtes de Pâques. 

Alors qui est donc Eostre, la fameuse déesse aux lièvres ?

 

Dans le monde anglo-saxon a surgi l’idée d’une déesse qui aurait présidé aux célébrations du printemps et qui aurait un lien avec le lièvre. Tout est né d’une mention d’un moine érudit qui a vécu entre les 7ème et 8ème siècle, Bède le Vénérable. Dans un ouvrage dont le thème est justement la fixation de la fête de Pâques, il mentionne les mois du calendrier saxon. Avril correspond au mois d’Eostre. Le savant précise que ce mois, qui correspond à la fête de Pâques, porte le nom d’une antique déesse saxonne dont on célébrait la fête durant cette période et que c’est pour cette raison que Pâques a pris son nom. Ce terme rappelle également le nom du point cardinal oriental, justement celui que le soleil indique à l’équinoxe de printemps. Malgré une absence d’informations attestées, ou peut-être grâce à cela, la déesse Eostre ou Ostara est devenue populaire, notamment dans le mouvement néo-paganiste qui la célèbre comme il se doit à l’équinoxe de printemps. Malheureusement, aucune preuve ne nous permet de confirmer ou d’infirmer l’existence d’une « déesse au lièvre » symbolisant le retour du printemps et la fertilité. Cette mention de Bède le Vénérable est tout ce que l’on possède à propos de cette déesse. 

Beaucoup plus tard, en 1835, Jakob Grimm reconstruit, sur cette base, une déesse germanique appelée Ostara. Il en fait une déesse de la lumière, de l’aube, rappelant l’Eos des Grecs. Bien entendu, ce profil divin s’adapte facilement à l’idée de la résurrection. En dehors de cela, rien n’atteste véritablement cette légende. Il s’agit peut-être d’une confusion avec la déesse scandinave de l’amour Freyja (Vénus) dont le char est tiré par des chats, animaux supposés aussi lubriques et prolifiques que les lièvres, oserions nous dire, réputés « chauds lapins ? » En l’absence de toute preuve avérée, c’est donc en toute liberté de pensée que, de nos jours, le lièvre de Pâques délivre ses œufs colorés dans les nids préparés à cet effet par les enfants puis… détale comme un lapin.

A noter que la légende d’Ostara a inspiré Tea Lindeburg pour sa série « Equinoxe » qui n’est pas du tout destinée aux enfants et où le lapin du printemps n’est pas vraiment très sympathique : lubrique, cruel, effrayant : cette série fantastique laisse interloqués les parents…

              

  Ostara » Johannes Gehrts

« Easter, l'équivalent anglais de « Pâques », est dérivé du nom de la déesse Éostre qui était célébrée au cours de l’équinoxe de printemps. L’équinoxe de printemps est le jour où le Soleil se lève exactement à l’Est : East en anglais. Éostre est la déesse de l’Est associée à la déesse Ostara germanique. »

                                                  

Mais nous n’avons pas fait le tour, ni soulevé tous les lièvres, et de loin : en Australie, les lapins qui depuis leur importation ont proliféré comme…des lapins, ne sont pas en odeur de sainteté. Un remplaçant a été trouvé : le bilby. Pour sauver ce petit marsupial menacé de disparition, et lutter contre la multiplication des lapins dans leur pays, les Australiens tentent de changer la légende  depuis quelques années : le vilain rongeur de Pâques est désormais supplanté par le bilby de Pâques pour sensibiliser les enfants et dégager des fonds destinés à la protection de ces petits marsupiaux en danger d'extinction. 

Rassurons-nous, le thème du lapin de Pâques a encore de beaux jours devant lui. Il est largement repris encore aujourd’hui, au XXIe siècle, dans l'iconographie populaire ou enfantine et sur des objets comme des cartes, figurines, peluches, albums etc. Le film d’animation Hop est basé sur ce personnage. La série web Epic Rap Battles of History a choisi le lapin de Pâques comme l'un des adversaires dans une battle de rap. Il affronte le guerrier Mongol Gengis Khan. On retrouve également un lapin de Pâques dans le film Les Cinq Légendes, un dessin animé américain réalisé en 3D par Peter Ramsey et sorti en 2012. 

                

     

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